Bonjour,

J'aborde avec cet article un éclairage essentiel pour la réalisation de l’œuvre : 
La Nature.

La Vézère quelque part dans le Limousin

"Sache d'abord, très cher, que notre Art consiste à imiter la nature; et de même que la nature produit d'elle-même arbres et plantes, que le jardinier ensuite multiplie en semant leurs semences ou en tirant d'eux greffes, ainsi la nature engendre-t-elle dans la terre et les profondeurs des profondeurs des montagnes de métaux comme l'Or et l'Argent, que l'artiste multiplie en les semant dans une terre appropriée, ou en les greffant sur une branche convenable. (...)" (Jodocus Greverus : "Secretum nobilissimum et verissimum", "Un secret très noble et vrai" - 1599 - Page 6)


 "L'art du greffage" - Goossen Van Vreeswijk
De Goude Son - Amsterdam - 1675

"Tu n'as donc autre chose à faire qu'à préparer comme il faut la matière, extérieurement, parce que d'elle-même elle fait intérieurement tout ce qui est nécessaire pour se rendre parfaite. (...) Ainsi prépare et dispose seulement la matière, et la Nature fera tout le reste." (William Salmon : "Le livre d'Arthéphius" - Bibliothèque des philosophes chimiques Tome I, page 156) 

"Il est impossible de mettre en acte ce que refuse la nature, même après des millénaires d'efforts" ("De la lumière de la Nature" - Auteur anonyme du XVI° siècle) 

La nature est variée, belle et vraie. Nous pouvons nous émerveiller à la vue de paysages, à la complexité des phénomènes de la vie autour de nous et en nous-même. La  nature sait s'adapter en toutes circonstances et ne semble avoir d'autre but que de permettre à tous êtres d'exister.
Pour l'alchimiste la nature est un aspect fondamental qu'il est bon de ne jamais perdre de vue.



"Seul un philosophe iconoclaste peut entre prendre cette lourde besogne : détacher tous les suffixes de la beauté, s'évertuer à trouver, derrière les images qui se montrent, les images qui se cachent, aller à la racine même de la force imaginante. Au fond de la nature pousse une végétation obscure; dans la nuit de la matière fleurissent des fleurs noires. Elles ont déjà leur velours et la forme de leur parfum." (Gaston Bachelard : "L'eau et les rêves" - Introduction)

Voici ci-dessous deux extraits du traité "Atalanta fugiens" ("L'Atalante fugitive") de Michael Maïer de 1618

Pour l'emblème II, Michael Maïer écrit :

"On dit que Romulus téta une âpre louve,
Jupiter, une chèvre, et que c'est assuré.
Faut-il donc s'étonner si, selon nous, la terre
A nourri de son lait le tendre fils des sages ?
Quand d'un faible animal le lait fit ces héros.
Comme il sera donc grand, celui dont la nourrice
Est le globe terrestre ! "
 "Atalante Fugitive" de Michael Maïer (1618), Emblème II :
"La terre est sa nourrice"

Observons l'image ci-dessus :
Au centre nous voyons la Terre qui nourrit au sein un enfant. A gauche, un  enfant est nourrit par une chèvre et à droite deux autres enfants nourrit par une louve. A gauche il s'agit de Zeus qui fût recueillit par des nymphes et nourrit par la chèvre Amalthée. A droite, il s'agit bien de Romulus et Remus allaités par la louve.
Cet emblème représente le Terre Philosophique, c'est à dire la Matière de l’œuvre dont le lait ou "lac virginis" ("lait de Vierge") nourrit l'enfant qui représente ici le souffre. Michael Maïer insiste dans son traité sur la nécessite et qualité de chaleur doit être naturelle. La chaleur peut provenir d'un feu modéré, du fumier de la putréfaction, du Soleil ou de l'air, des entrailles de la mère ou d'ailleurs, elle reste indispensable pour la réalisation.
Louve Capitoline - Statue 450 av J-C - Rome


Cette sculpture quoique étrusque devint très tôt le symbole de Rome. Les jumeaux Romulus et Remus allaités par la louve furent rajoutés à la fin du XIV° siècle pour représenter la légende romaine.


  
L'emblème XLII :

"In Chymicis versanti Natura, Ratio, Expérientia & lectio, sint Dux, scipio, perspicilia et lampas." ("A celui qui est versé dans la Chymie, la nature, la raison, l'expérience et la lecture doivent tenir lieu de guide, de bâton, de lunettes, de lampe.")

Michael Maïer écrit :
"Que la nature soit ton guide, que ton art
La suive pas à pas; tu t'égares loin d'elle.
Que l'esprit soit ta canne; affermissant tes yeux
L'expérience au loin de donnera de voir.
La lecture, flambeau brillant dans les ténèbres,
T'éclaircira l'amas des mots et des matières."

"Atalante Fugitive" - Fugue de l'emblème XLII - Michael Maïer (1618)

"Atalante Fugitive" de Michael Maïer (1618), Emblème XLII :
"A celui qui est versé dans la Chymie, la nature, la raison, l'expérience et la lecture doivent tenir lieu de guide, de bâton, de lunettes, de lampe."

Observons l'image ci-dessus :
Ici, deux personnages : A gauche la Nature représentée par une femme, et , le protagoniste est l'homme à droite.
La Nature doit être le guide de l'artiste. Ici, le protagoniste suivre les traces des pas de la Nature. La raison doit être le bâton sur lequel il peut prendre appuis de craindre de trébucher et de tomber dans des erreurs insensées. C'est pourquoi l'homme tient un bâton dans sa main droite. (Le côté de la conscience) L'Expérience doit servir de lunettes qui, de même qu'elle permet au myope de voir à distance, autoriseront l'artiste à discerner le vrai du faux.
La Lecture doit illuminer l'intelligence comme une brillante lumière sans laquelle "ne sont partout que ténèbres et nuages épais." La lecture de bons livres doit être souvent renouvelée, autrement elle est inutile."

C'est pourquoi Bacassar écrit dans le "Turba Philosophorum" : 
"Qui ergo inquit longanimis erit, libenterque patientia fruitur, in tramite justo hujus artis meabit qui verso citius seputat ex libris nostris fructum capere posse fallitur satiusque fuerat, non inspicere guidem, quam unquam contigisse : Et quae ibidem sequuntur." 
C'est à dire : "Celui qui sera patient et qui jouit de sa patience, progressera dans la juste voie de cet Art (l'alchimie), mais quelqu'un venait à croire qu'il peut rapidement saisir le fruit de nos livres, il se trompe et mieux aurait valu pour lui qu'il ne les ait jamais ouvert."
La Nature, la Raison, l'Expérience et la Lecture constituent donc, selon Michael Maïer, les quatre roues du char philosophique qui permet d'avancer.
 
Que signifie "Laisse-toi conduire par la Nature"
C'est être à l'écoute de son intériorité, des cycles de nos énergies, et, du déroulement du processus intime d'individuation. Il s'agit simplement d'accompagner ce développement car ce processus est parfaitement naturel. 
La maladie en fait n'est autre que lorsque nous entravons ce déroulement inné qui s'opère en nous. C'est une façon pour l'organisme au mieux de nous alerter que quelque chose ne va pas; au pire une façon de s'adapter à ce qui ne va pas.
Quelle maladie que ce soit,  psychique ou physique, la maladie est toujours une dénaturalisation, une "déviation" de la Nature.
Un des surnom de l’alchimie est "la médecine des sages", et, un des buts ou promesse qui accompagne la réalisation de la Pierre philosophale, est une longue et saine vie.


 La roue des anges - Miniature française du XIV° siècle

Observons l'image ci-dessus :
Deux anges mettent la sphère des étoiles fixes en mouvement, qui, à leur tour, active toutes les autres sphères.



  Le chemin de Saint Jacques de Compostelle
... quelque part entre Cahors et Moissac.


Albrecht Durer - Gerson représenté en pèlerin - 1494

Observons le dessin ci-dessus :
Le pèlerin est une représentation de l'alchimiste à la recherche de la Pierre philosophale. Il représente aussi le Mercure philosophique en raison de sa mobilité et volatilité. Le but du pèlerin est d'atteindre Saint-Jacques de Compostelle, de rencontrer le "Christ-Lapis" ou Pierre Philosophale; c'est à dire la connaissance hermétique, la réalisation du "Soi intérieur".
Remarquez l'ange sur la droite qui guide le pèlerin qui lui-même tient dans les mains où sont représentés le Soleil et la Lune. Le bâton est un attribut de Saint-Jacques patron des alchimistes et des guérisseurs.

« Notre Mercure, nous croyons l’avoir dit, est ce pèlerin, ce voyageur auquel Michael Maïer a consacré l’un de ses meilleurs traité. Or, en utilisant la voie sèche, représentée par le chemin terrestre que suit, au départ notre pérégrin, on parvient à exalter peu à peu la vertu diffuse et latente, transformant en activité ce qui n’était qu’en puissance. L’opération est achevée lorsque paraît à la surface une étoile brillante, formée de rayons émanant d’un centre unique, prototype des grandes roses de nos cathédrales gothiques. C’est là le signe certain que le pèlerin est parvenu heureusement au terme de son voyage. Il a reçu la bénédiction mystique de saint Jacques, confirmée par l’empreinte lumineuse qui rayonnait, dit-on au-dessus du tombeau de l’apôtre. L’humble et commune coquille qu’il portait au chapeau s’est changée en astre éclatant, en auréole de lumière. » (Fulcanelli : « Les Demeures philosophales » Tome I page 435) 




Voici au-dessus et en-dessous trois diagrammes extrait "De natura rerum" - Traité sur la nature des choses- 613 d'Isidore de Séville
Ces schémas indiquent les rapports entre eux les quatre éléments d'Empédocle d'Agrigente (Grèce - V° siècle avant J-C)  : Feu, Terre, Air & Eau,  avec les quatre saisons (Printemps, Été, automne & Hiver) et les quatre points cardinaux, et les quatre tempéraments ou humeurs corporelles d'Hippocrate (Sanguin, Colérique, mélancolique, flegmatique). 
Isidore de Séville fondent ainsi un système Macrocosme / Microcosme.

Printemps
Eté
Automne
Hiver
Air
Feu
Terre
Eau
Sanguin
Colérique
Mélancolique
Flegmatique
Froid
et sec
Chaud
et sec
Chaud et humide
Froid et humide
 
.


"De natura rerum" Isidore de Séville - 613


"La nature jouit de la nature; la nature triomphe de la nature; la nature maîtrise la nature." (Pseudo-Démocrite : "Question naturelle" - Collection des anciens alchimistes grecs - Macelin Bethelot)
"Bien qu'en vérité l'Art ne transcende pas la nature, confectionnant une nouvelle nature par la simplicité de son travail, il la surpasse cependant jusqu'à obtention de cette nature qu'il peut proprement subtiliser. D'où l'on peut dire que l'Art imite la nature, non en ce qu'il en réalise une toute nouvelle, mais en ce qu'il en rend plus subtile la vertu. Aussi l'art commence-t-il son œuvre là où la nature s'avère défaillante, mettant à découvert et rendant manifeste la nature enfermée en toute chose." (Richard l'Anglais : "La correction des insensés" - Traité du XII° siècle - Tome II page 387)

"Elle (la nature) ne porte en effet rien au jour qui de soi-même s'avère accompli, et c'est donc à l'homme d'en parachever les desseins; cette accomplissement portant le nom d'Alchimie. (...) Est par conséquent alchimiste quiconque conduit au terme voulu par la Nature ce qui grandit en elle pour le profit de l'homme. (...) Or, la Nature te notifie elle-même, au travers des choses, ce à quoi tu dois t'appliquer afin d'apporter à ta médecine toute son efficacité." (Paracelse : "Liber Paragranum, VIII" - 1528 - Tome I, page 381-382)

"Nous portons en nous le centrum naturae, le cœur de la Nature: Nous sommes libres de faire un ange de ce que nous sommes, et nous sommes libres de faire un démon de nous-même, et nous les sommes pareillement; nous opérons sans cesse et de partout dans la nature, nous cultivons notre champs" (Jacob Böhme)
 
D.A Freher : "Paradoxa Emblemata manuscrit" - XVIII° siècle

Observons l'image ci-dessus :
Voici l'homme à l'image de Dieu qui se tient au milieu entre Dieu (La lumière solaire blanche à gauche) et le règne des Enfers (La ténèbres avec sa foudre à droite) entre l'amour et le courroux. "Celui là est capable des deux, de l'un comme de l'autre ... Choisis duquel tu veux être, et tu seras cela ..."
"Je dis donc que la nature est une, vraie, simple, entière en son être, et que Dieu l'a faite devant tous les siècles, et lui a enclos un certain esprit universel Il faut savoir néanmoins que le terme de la Nature est Dieu, comme il en est le principe; car toute chose finit toujours en ce en quoi elle a pris son être et son commencement. (...) Il est donc à remarquer que la nature n'est point visible bien qu'elle agisse sans cesse; car ce n'est qu'un esprit volatil, qui fait son office dans les corps et qui a son siège et son lieu en la volonté divine." (Le Cosmopolite : "Novum Lumen chymicum" - 1609 - Jean-Jacques Manget - Tome II, page 465)



Proverbe celtique : "Trois bougies repoussent les ténèbres : La vérité, la connaissance et les lois de la nature."
 
 Robert Fludd - Utrinsque Cosmi Tome 1 - Oppenheim - 1617 

Observons l'image ci-dessus :
Nous avons ici une représentation de la Nature qui est la nourrice de toute chose est aussi le lien qui relie l'empyrée à l'éther sidéral et au monde subliminaire des éléments. La Nature est "l'âme du monde" et se fait donc médiatrice entre l'Esprit divin et sa manifestation sensible. Remarquez la chaine la relie à Dieu et celle qui la relie au Singe. 
Ce singe représente l'Alchimiste avec un jeu de mot (Signe et Singe : deux anagrammes) Cela fait référence à la langue des oiseaux. L'alchimiste imite la Nature, il "singe" la Nature. Il est donc un singe ! Par ailleurs, l'alchimiste cherche dans la Nature les signes. Or, le "Signe de Saturne est Singe de Natures !"  (Autre anagramme) Et, c'est sous le signe de saturne que débute le magistère. 
Observez sur son sein de la Nature le Soleil véritable, et, sur son ventre la Lune. Elle a son pied droit posé sur la terre et l'autre dans l'eau, ce qui indique qu'elle établie entre les éléments opposés et complémentaires : Le mercure et le Souffre par exemple. 


"La complainte de Nature à l'alchimiste errant"
Miniature de Jean Perréal - Peintre à la cour de marguerite d'Autriche - 1516
Musée Marmottan - Paris


Observons l'image ci-dessus :
La Nature (ou l'ange de la nature envoyé par Dieu) dialogue avec le philosophe, et lui exhorte de quitter le cercle borné des chimistes de laboratoire. "Tu ne pourras parvenir à la connaissance si tu ne passes par mon école". Cette école est représenté ici par l'arbre qui a trois racines : minérale, végétale et sensitive. C'est là que s'accomplit, par une longue coction, la transformation du germe terrestre des métaux, des animaux et des plantes, qui passe par les quatre éléments avant que la sublimation ne le mène au niveau le plus haut de l'élixir ou de "l'or végétal". 
La figure allégorique de la Nature représente l'aspect féminin et maternel de la création.
Nous pouvons observer que l'ange de la nature est ici couronné, c'est à dire souveraine, et que sont représentés sur sa couronne les symboles des sept métaux nécessaire à la réalisation de l'opus. 
Remarquez que sur la droite l'athanor de l’alchimiste a son feu éteint, alors que au pied de l'arbre sous l'ange de la nature un petit four laisse entrevoir un feu doux qui brule.
Remarquez également le haut du dossier qui rappelle le motif de la double spirale cosmique et le précepte alchimique "Solve et Goagula" (dissoudre et reconstruire) expression en rapport avec les cycles de vie (mort et renaissance) qui accompagnent dans un premier temps le processus de purification, puis, dans un second temps celui de la création de la Pierre Philosophale. Nous pouvons voir également dans les motifs de ce dossier un cœur, ou la forme d'un œuf, symbole sur lequel nous reviendrons.

 "La complainte de Nature à l'alchimiste errant" - Détails
Miniature de Jean Perréal - 1516

 
  
 Giorgione - La Tempête - 1505 - Musée de Venise

Observons le tableau ci-dessus :
L'homme adulte à gauche représente le principe masculin qui féconde la terre. De cette union naîtra le Pierre (Ici l'enfant) qu'il regarde.
L'éclair dans le ciel et la source sont les étapes de la maturation et sublimation de la matière dans la voie alchimique humide.
Le femme a droite qui nous regarde, est une allégorie de la Terre nourricière qui allaite l'enfant ou Lapis.
Remarquez que les quatre éléments (Terre, eau, Feu et Air) sont représentés et qu'un mince pont relie les deux rives c'est à dire les deux pôles : Humain et Nature.




"La Nature Alchimie" - Jerome Reussner - 1582 - Université de Bâle


Observons l'image ci-dessus :
La Nature est représentée sous la forme d'une femme et d'un arbre. Remarquez la couronne que porte la femme qui indique sa souveraineté. L'arbre nait de la Vierge mère et porte d'ineffables fruits. Un oiseau qui déploie ces ailes au dessus de sa tête représente le Saint-Esprit. La Nature sort rajeunie des deux Alambics (en bas au sol) de la Lune et du Soleil qui ont donné leurs semences d'Argent et d'Or, c'est à dire respectivement féminine et masculine. Remarquez les deux groupes d'oiseaux associés à ces deux polarités. Leurs vols partent dans deux directions opposées qui indiquent respectivement la "solution" et la "coagulation".

Lune
Soleil
Féminin
Masculin
Argent
Or
Diane
Apollon

Sophia, déesse si importante dans le gnosticisme, est l'épouse mystique et "souveraine intérieure" des philosophes. Elle est déesse mère, et déesse Nature et recouvre souvent dans le magistère le culte de la divine Eau Mercurielle. "Notre très précieuse Vierge" est le nom aussi donné à Mercure parce que Marie a reçu "la solution" du ciel et conçut le Lapis du monde.
Cybèle, déesse mère de l'antiquité ou "L'Alchimie".
Médaillon du portail central de la cathédrale Notre-Dame de Paris.

Pour plus commentaire sur ce médaillon du portail centrale de la cathédrale de Notre-Dame de Paris, consulter l'article : Notre-Dame de Paris (4)


"Déesse Mère" - Paléolithique supérieur - 23 000 avant J.-C



Isis allaitant son enfant Horus -  Statue de 130 ap. J-C
Rome, palais du Vatican - Museo Gregoriano Egizio

Ci-dessus, trois archétypes de la Déesse Mère ou "Grande-Mère" : Cybèle, La Vénus de Willendorf, Isis et ci dessous : Déméter.


Déméter ou la "terre mère" est dans la Grèce antique 
la déesse de l'agriculture, des céréales




"Il faut connaître devant tout qu'il y a trois causes effectives qui sont le commencement, le milieu et la fin de toutes choses, lesquelles elle tiennent toutes enfermées en elles, et sont Dieu, Nature et Art (Alchimie)." (Henri de Linthaut : "Commentaire sur le Trésor des trésors de Christofle de Gamon" - 1610 - Page 68)

"Opus Medico Chymicum" - J.D Mylius - 1612
Gravure sur cuivre de Merian
 

Observons l'illustration ci-dessus :
Voici tous les composants du Grand Œuvre  : L'Axe horizontal sépare la sphère du divin de la roue de la nature. Les correspondances du Macrocosme et du Microcosme sont symbolisées. En haut, la Sainte Trinité (Yahvé au centre, l'agneau de Dieu ou le Christ à gauche, la colombe ou le Saint-Esprit à droite) et les Anges de Lumières influençant le Zodiaque. dans la rue inférieure le Corbeau représente le premier stade de l’œuvre ou Nigredo; Le Signe  symbolise le second stade de l’œuvre ou Albedo; Le Dragon représente le Sujet de l'Art; le Pélican symbolise le Mercure, et, le Phénix est une allégorie du troisième stade de l’œuvre ou Rubedo.

Pour une étude plus détaillée sur le corbeau, lire l'article : Le Corbeau

Le personnage central de l'illustration symbolise la puissante indissolubilité de la Pierre d'Or.
En bas, autour de ce personnage central une forêt d'arbres qui portent les différents symboles des métaux.
Remarquez par ailleurs les nombreuses illustrations des "contraires" représentés ici :
 


Ciel
Terre
Soleil
Lune
Jour
Nuit
Lumière
Matière
Esprit
Corps
Logos
Éros
Macrocosme
Microcosme
Mercure
Soufre
 …


"La Nature nous sert de livre, de flambeau, de miroir et de guide, pour connaître et trouver en son intérieur cette sagesse ouvrière et gouvernante de l'univers et de toutes ses productions : par elle nous passons à la contemplation et adoration de Dieu qui a mis les vertus merveilleuses de son esprit éternel : nous l'y voyons des yeux de l'intelligence comme notre Auteur et conservateur, et le créateur de toutes choses; nous l'y reconnaissons pour notre principe spirituel de vie et de santé; la sagesse est en effet le signe de son alliance avec les hommes, en qui il fait ses délices d'habiter par son Verbe incréé, comme son peuple chéri, le plus favorisé et honoré de ses dons célestes (...)" (Philovite Cosmocole "La Vérité sortant du Puits Hermétique, ou, La Vraye Quintessence Solaire et Lunaire" - 1753 - page 71)

"La nature est plus vertueuse, savante et habile que tous les médecins et médecines du monde; ses principes, fondés sur la vertu divine coopérante, sont certains et véritables; ses voies sont droites et simples, pour opérer à sa conservation, si elle n'en est empêchée; et ses effets sont souverains et merveilleux, Si on lui en laisse ou facilité la liberté par son principe radical. Il n'est pas besoin d'être philosophe pour raisonner ainsi, tout homme de bon sens conclura à cette  vérité, qui lui servira de clef pour ouvrir toutes les portes de la Nature, et connaître jusque dans son intérieur de ses arcanes les plus mystérieux. (...) 
Mais que le monde soit une fois enfin convaincu que notre Médecine hermétique diffère en tous points et à tous égards de tous ces remèdes contre nature: Elle est un principe vivant, animé, moteur, animant, spiritualisant et vivifiant; aussitôt qu'elle est introduite au corps, elle y répand toute son amiable analogie, et, par son élasticité circulaire et son énergie motrice, elle se porte dans toute la capacité pour y distribuer son Baume salutaire (...)" (Philovite Cosmocole "La Vérité sortant du Puits Hermétique, ou, La Vraye Quintessence Solaire et Lunaire" - 1753 - page 27 et 55)


"Nature" - Nicolas de Lacques - 1665

Observons l'image ci-dessus :
Mercure est à gauche, la Nature est à droite.

Mercure à genoux a déposé son caducée et recueille à l'aide d'un coquillage de la main droite un peu de matière. Cette matière n'est autre que de l'eau mais il s'agit ici d'Eau mercurielle. Le coquillage est une coquille Saint-Jacques ce qui renvoie d'une part au pèlerinage de Compostelle mais aussi au signe zodiacal du Cancer gouverné par le Lune. Mercure représente un adepte, c'est à dire un simple initié qui a acquis la foi dans l’œuvre de la transmutation alchimique, ce que la psychologie moderne accession au processus d'individuation. L'eau recueillie va lui permettre de conquérir la Pierre philosophale, en d'autres termes accéder à la connaissance du "Soi".

Dame Nature, sœur de Mercure, est représentée nue c'est à dire dans sa simple vérité et se tient debout sur un triangle. A l'arrière plan la montagne symbolise le pôle introvertie de la psyché. Dame Nature semble attendre entre deux vagues c'est à dire entre deux montées de l'inconscient. Si elle apparait sous les traits d'une humaine c'est que le processus est commencé et que Dame Nature est maintenant plus proche du pôle de la conscience. Le triangle sur lequel elle se tient debout en témoigne et symbolise l'unité des Eaux mercurielles.
C'est pourquoi Salomon Trismosin écrit : "Ex Duabus Aqui Unam facite, qui queritis sole(m) et luna(m) facere et date bibere inimico vro, et videbitis cum mortuum. Dei(n)de de aqua terra facite, et lapide(m) multiplicastis." C'est à dire "Faites une seule eau à partir de deux, vous qui cherchez à travailler avec le soleil et avec la lune, et donnez à boire le vin ennemi, et vous verrez avec (les yeux) des morts. Ensuite faites de la terre avec de l'eau, et vous multiplirez la pierre."
("Splendor Solis" - Enluminure numéro trois - de Salomon Trismosin)  

Mercure et la Nature unissent leurs flambeaux pour la réalisation de l'Opus. C'est une union d'amour mais aussi de transcendance. De ce feu secret se dégage une grande fumée, et, au-dessus de l'éprouvette  : La Lune et le Soleil sont les symboles des opposés. Par l'union des contraires par le mariage des opposées se redéfinit un nouveau Centre. Remarquez que c'est le Lune qui doit chauffer afin d'intégrer le Soleil dans la cornue. 

Merci de votre lecture.


Pour terminer une petite récréation : "Lux Aeterna" de György Ligeti


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